Italie : la Cour constitutionnelle demande au Parlement de légiférer sur l’assistance au suicide

Publié le : Thématique : Fin de vie / Euthanasie et suicide assisté Actualités Temps de lecture : 2 min.

 Imprimer

La Cour constitutionnelle italienne a décidé de reporter sa décision concernant l'affaire Cappato en donnant un an au Parlement pour combler un « vide juridique » sur le délit d'assistance au suicide.  

Pour rappel, Marco Cappato, politicien italien membre du parti des Radicaux italiens, s'était lui-même dénoncé d'avoir accompagné en Suisse Fabio Antoniani, alias DJ Fabo, devenu tétraplégique et aveugle après un accident de voiture, afin de l'assister au suicide le 27 février 2017. Marco Cappato espérait par son aveu public remettre en cause le refus de l'Etat italien d'autoriser l'euthanasie. (Voir Bulletin de l'IEB)

La Cour d'assises de Milan avait jugé qu'il fallait opérer une distinction entre l'instigation et l'aide au suicide, la dernière ne méritant pas, selon elle, de sanction du fait qu'elle n'implique pas d'influence sur la décision de se suicider. Elle demandait à la Cour constitutionnelle de déclarer la disposition pénale qui incrimine l'aide au suicide, contraire au droit à l'autodétermination garanti par la Constitution. L'article en question prévoit que « celui qui induit une personne au suicide ou renforce le propos d'une personne à se suicider, ou bien en facilite l'exécution de n'importe quelle manière, est puni d'un emprisonnement de cinq à douze ans ».

Le raisonnement de la Cour d'assises s'appuyait aussi sur la loi du 22 décembre 2017 relative aux Dispositions Anticipées de Traitement (DAT) qui oblige le médecin à respecter la volonté du patient (par exemple de se laisser mourir en refusant l'alimentation et l'hydratation) et l'exempte par conséquent de toute responsabilité pénale. (Voir Bulletin de l'IEB) Une loi dont l'application provoque de grandes difficultés, en l'absence de circulaires.

Dans son ordonnance, la Cour constitutionnelle considère néanmoins comme légitime de punir la conduite « qui pave la voie des choix suicidaires, au nom d'une conception abstraite d'autonomie individuelle qui ignore les conditions concrètes d'inconfort ou d'abandon dans lesquelles, souvent, de telles décisions sont prises. En effet, il appartient à la République de mettre en place des politiques publiques visant à soutenir ceux qui tombent dans de telles situations de fragilité, supprimant ainsi les obstacles qui entravent le plein développement de la personne humaine ». C'est le passage le plus significatif de l'ordonnance de la Cour, qui ajoute cependant que « l'interdiction absolue de l'aide au suicide finit par limiter la liberté d'autodétermination du patient dans le choix des traitements, y compris ceux visant à le libérer de la souffrance (...) ».  En cela, elle invite le législateur à trouver un « équilibre ».

Actuellement, les deux composantes de la majorité parlementaire sont partagées sur le sujet: le Mouvement cinq étoiles (M5S) se prononce en faveur de l'euthanasie, tandis qu'une partie importante de la Ligue s'y oppose.

Bien que la question ne figure pas dans l'accord de gouvernement, le président de la Chambre Roberto Fico (M5S) a immédiatement applaudi l'ordonnance de la Cour disant que le politique devait à présent « affronter le thème d'euthanasie ».

Voir l'article du magistrat Alfredo Montovano sur l'ordonnance de la Cour constitutionnelle.

Source : Le Figaro ( 24/10/2018) – Il Tempo (17/11/2018)