Augmentation des avortements d'enfants trisomiques depuis le remboursement du NIP-test

Auteur / Source : Publié le : Thématique : Début de vie / Diagnostics prénataux Actualités Temps de lecture : 2 min.

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D'une étude à grande échelle coordonnée par l'UZ Leuven (KULeuven), il ressort que le remboursement du dépistage prénatal non invasif (NIP-test) en Belgique s'est accompagné d'une forte diminution des naissances d'enfants trisomiques.

Le NIP-test permet de dépister de manière non invasive, et avec une fiabilité importante, plusieurs anomalies génétiques telles que la trisomie 21 (syndrome de Down). Depuis juillet 2017, son coût est entièrement pris en charge par la sécurité sociale belge (voy. News IEB).

Près de 80% des femmes enceintes choisissent depuis lors de réaliser le NIP-test.

 

La fiabilité importante du dépistage par NIP-test présente l'avantage de rendre moins nécessaires les diagnostics prénataux invasifs tels que l'amniocentèse (ponction du liquide amniotique) ou la choriocentèse (prélèvement de cellules chorioniques). La pratique de tels diagnostics invasifs a d'ailleurs diminué de moitié entre 2014 et 2018, avec l'introduction de plus en plus large du NIP-test.

 

Diminution d'un tiers des naissances d'enfants porteurs de trisomie 21

Cette pratique de plus en plus généralisée du NIP-test s'accompagne dans le même temps d'une augmentation du nombre d'avortements pratiqués en raison de la trisomie 21 dépistée chez l'enfant à naître. Si le chiffre relatif aux avortements liés à ce motif n'est pas précisément connu, il ressort en tout cas de l'étude que le nombre de naissances d'enfants porteurs de trisomie 21 ne représente plus que 0,04% de l'ensemble des naissances en Belgique en 2018, alors qu'il se situait à 0,06% en 2014.

Une autre étude, réalisée cette fois par Studiecentrum voor Perinatale Epidemiologie (SPE), confirme d'ailleurs ce chiffre : de 42 naissances d'enfants porteurs de trisomie 21 en 2014 en Flandre, l'on est passé à 28 naissances en 2018, ainsi qu'en 2019.

 

95 % de grossesses avortées : un choix éclairé ?

En parallèle de cette tendance, il convient de rappeler qu'on estime à 95,5% le taux de grossesses interrompues par un avortement en cas de diagnostic positif de la trisomie 21 chez le foetus (voy. rapport du KCE de 2014).

Si le NIP-test présente l'avantage de dépister sans danger et de manière fiable de nombreuses anomalies génétiques, et d'ainsi éviter, dans certains cas, certaines complications de grossesse, force est de constater que sa généralisation s'accompagne d'un recours massif à l'avortement en cas de dépistage de la trisomie 21, équivalant à 95% des grossesses en Belgique comme dans d'autres pays tels que la France et le Royaume-Uni (voy. à ce sujet le Dossier IEB : L'eugénisme au temps de la procréation médicalisée).

Une telle proportion traduit le constat d'un eugénisme privé, fruit de la liberté individuelle de chaque femme face à une grossesse, sans que l'État ne la contraigne à quel que choix que ce soit. Ce constat peut toutefois légitimement conduire à s'interroger sur le caractère véritablement éclairé du choix posé par les femmes en faveur de l'avortement en cas de dépistage de la trisomie.

 

Quand l'intégration des personnes handicapées tranche avec le refus de les voir naître

Le recours massif à l'avortement tranche par ailleurs avec l'amélioration continue des conditions de vie des personnes porteuses du syndrome de Down, tant du point de vue de leur santé que de leur intégration sociale et professionnelle. L'accueil de plus en plus positif réservé par nos sociétés aux personnes trisomiques contraste en ce sens fondamentalement avec l'appréciation du caractère indésirable de la naissance de ces mêmes personnes.

De même convient-il de s'interroger, dans ce contexte, sur la capacité des femmes enceintes à choisir librement de recourir au NIP-test, dont l'usage est désormais généralisé, gratuit et systématique. Soulignons ici toute l'ambivalence d'un tel dépistage : vu par d'aucunes (et d'aucuns) comme une manière de se préparer sereinement à l'éventuelle venue d'un enfant porteur de handicap avant sa naissance, le NIP-test sera, chez d'autres femmes, perçu au contraire comme l'amorce d'une pression sociale implicite vers l'avortement, dont il sera ensuite difficile de faire abstraction.