Une loi réservant la PMA aux cas d’infertilité pathologique discrimine-t-il les femmes homosexuelles

Publié le : Thématique : Début de vie / Procréation médicalement assistée Actualités Temps de lecture : 2 min.

 Imprimer

En France, un couple de femmes s'est vu refuser une insémination artificielle avec donneur ( IAD ) par un hôpital, en vertu de la loi qui limite ces inséminations aux cas « d'infertilité pathologique, médicalement diagnostiquée ». Les deux femmes ont saisi la Cour européenne des droits de l'homme, car selon elles, cette mesure porte atteinte à leur vie privée et les discrimine par rapport aux couples hétérosexuels qui seraient stériles.

La Cour européenne n'examinera pas leur requête car les intéressées n'ont pas saisi au préalable tous les tribunaux français compétents. Elle s'était néanmoins déjà exprimée sur cette discrimination invoquée, dans un arrêt du 15 mars 2012, « Gas et Dubois c/ France », et y avait rejeté l'argument de discrimination.

« Si le droit français ne prévoit l'accès à l'IAD que pour les couples hétérosexuels, cet accès est également subordonné à l'existence d'un but thérapeutique : remédier à une infertilité dont le caractère pathologique a été médicalement constaté ou éviter la transmission d'une maladie grave.  Ainsi, la situation des couples hétérosexuels reconnus infertiles n'est pas comparable à celle des requérantes [couple de femmes]. Il s'ensuit, que la législation française concernant l'IAD ne peut être considérée comme étant à l'origine d'une différence de traitement dont les requérantes seraient victimes ».

Aude Mirkovic, porte-parole de l'Association Juristes pour l'Enfance, avance que ce n'est pas le respect de la liberté des femmes homosexuelles qui est réellement en cause. Celles-ci revendiquent leur autonomie à avoir des enfants de la manière qu'elles choisissent « dans leur vie privée », mais si elles sollicitent le législateur pour ce faire, elles cessent d'être totalement autonomes et sortent de la sphère de la vie privée.

Ce que les femmes revendiquent comme une « libre disposition de soi, requiert d'impliquer les autres (corps médical, tiers donneur, enfants, société) », affirme le Comité consultatif national d'éthique de France (CCNE), qui s'est prononcé sur les demandes sociétales de recours à l'assistance médicale à la procréation (AMP) dans son récent avis n°126.

Et « lorsque la procréation s'exerce dans la sphère privée, que les femmes soient seules ou en couple, elle n'autorise pas de droit de regard de la société […]. Mais, lorsqu'il est demandé à la société de leur reconnaître une possibilité d'accès à des techniques médicales jusqu'à présent réservées aux infertilités pathologiques, il est de sa responsabilité de mettre en question les intérêts de ces femmes en les confrontant à d'autres intérêts ».

Au nom de l'Association Juristes pour l'Enfance, Aude Mirkovic soutient que l'organisation légale de l'insémination de femmes seules ou en couples de femmes priverait, de droit, les enfants concernés de père. Une telle loi méconnaîtrait les droits de l'enfant garantis par la Convention internationale des droits de l'enfant.


Articles similaires

France : vers l'extension de la PMA aux femmes seules et aux couples de femmes

France : vers l'extension de la PMA aux femmes seules et aux couples de femmes

- Procréation médicalement assistée

En France, ce jeudi 24 juin 2021, le Sénat a rejeté unanimement en 3e lecture la loi bioéthique faute de consensus avec l'Assemblée nationale. L'Assemblée devrait avoir le dernier mot le 29 juin prochain sur le texte qu'elle a soumis le 8 juin et qui avait été voté à 84 voix contre 43. Parmi les mesures phares de ce projet de loi, on compte, en l'état : 

L'élargissement de la PMA (procréation médicalement assistée) aux couples de femmes et aux femmes seules, alors qu'elle était jusque-là limi...

Lire la suite

L’Académie Nationale de Médecine française défavorable à l’extension de la PMA aux couples de femmes et aux femmes seules

L’Académie Nationale de Médecine française défavorable à l’extension de la PMA aux couples de femmes et aux femmes seules

- Procréation médicalement assistée

Dimanche prochain 6 octobre 2019, marcheront dans les rues de Paris des citoyens venus des quatre coins de la France pour manifester leur indignation face au projet de loi bioéthique. Outre la suppression d'importantes balises entourant la recherche sur les embryons humains, ce projet de loi prévoit d'autoriser les femmes seules et les couples de femmes à recourir à la procréation médicalement assistée, autrement dit à concevoir volontairement un enfant qui n'aura pas de père. L'Académie natio...

Lire la suite

L’État néerlandais assurera le remboursement de la PMA hors des cas d’infertilité

L’État néerlandais assurera le remboursement de la PMA hors des cas d’infertilité

- Procréation médicalement assistée



Depuis des années aux Pays-Bas, l'insémination artificielle de femmes seules ou de couples de femmes est remboursée en violation de la loi. Le ministre de la santé Bruno Bruins a annoncé qu'il régulariserait la situation dès le 1er janvier 2020. Pour l'année 2019, il permet que les remboursements continuent sur base de l'assurance santé.
Les assureurs santé ont pris l'habitude de rembourser l'insémination artificielle chez les femmes seules ou les couples de femmes, alors que la loi (Zorgver...

Lire la suite