
En Europe, la GPA est devenue un nouveau terrain d’affrontement juridique et idéologique. Les enjeux sont profonds : il y va du désir d’enfant, mais aussi de la vie et de la dignité de nombreuses femmes, souvent précarisées, et d’enfants dont la séparation de leur mère porteuse à la naissance est expressément planifiée au profit de leurs commanditaires. Il s’agit aussi majoritairement de transactions internationales, compliquant les tentatives d’opposition qu’entreprendrait l’un ou l’autre pays plus soucieux des droits et du bien-être de ces enfants et des mères porteuses sollicitées.
L’Espagne figure parmi les pays mettant fin à la permissivité à l’égard de la pratique des mères porteuses à l’étranger. La pratique de la GPA en Espagne est interdite par la loi depuis 2006. Mais concernant les GPA réalisées à l’étranger, l’enfant issu d’une GPA pouvait jusqu’à présent être directement enregistré à l’état civil si les commanditaires présentaient une décision judiciaire rendue dans le pays où avait été pratiquée la GPA, établissant la filiation entre les commanditaires et l’enfant. Rien qu’en 2023, 154 enfants issus de GPA avaient été enregistrés de cette façon en Espagne.
Par une instruction du 28 avril 2025, le gouvernement espagnol de gauche vient d’interdire l’inscription directe dans le registre d’état civil des enfants nés par GPA à l’étranger. Les personnes commanditaires de l’enfant devront, pour obtenir cette inscription, prouver l’existence d’un lien biologique « entre l’un des parents d’intention et l’enfant » ou entamer une procédure d’adoption.
La réglementation espagnole se conforme ainsi à la récente jurisprudence de la Cour suprême du pays, qui, par une décision du 4 décembre 2024, déclarait contraires à l’ordre public les contrats de gestation pour autrui. Selon la Cour suprême, ces contrats portent gravement atteinte aux droits de l’enfant et de la femme enceinte.
L’Espagne se réapproprie donc le pouvoir de reconnaître un lien de filiation ou d’adoption, en fonction de la réalité biologique ou d’une procédure d’adoption en bonne et due forme, lorsque le lien biologique fait défaut. Cependant, la mesure ne va pas aussi loin qu’en Italie, qui interdit non seulement la GPA sur son territoire mais aussi à l’étranger, la rendant passible de sanctions pénales.
Au Royaume-Uni, le gouvernement a quant à lui choisi de marquer une pause dans la facilitation de la gestation pour autrui sur le territoire national, en raison d’autres « priorités essentielles ».
Rappelons qu’en Belgique, la GPA – opérée sur le territoire ou à l’étranger - n’est ni légale ni interdite, mais tolérée. Étant donné l’absence de loi ou de jurisprudence ferme faisant autorité sur la question, les administrations et tribunaux se montrent plus ou moins ouverts à la reconnaissance du lien de filiation sur la base d’une décision judiciaire ou d’un acte de naissance établis dans le pays où a eu lieu la GPA.