France et Belgique : l’avortement demeure l’icône des combats idéologiques

Auteur / Source : Publié le : Thématique : Début de vie / Avortement Actualités Temps de lecture : 3 min.

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Ce 30 janvier à l’Assemblée nationale française, une large majorité des députés se sont exprimés en faveur du projet de loi visant à inscrire dans la Constitution la « liberté garantie » de la femme de recourir à l’avortement. Le texte doit encore être examiné par le Sénat le 28 février. Il ne sera finalement intégré à la Constitution française que moyennant l’aval de 3/5ème des membres du Congrès (Sénat et Assemblée réunis).

Ce projet soulève notamment l’opposition de nombreux professionnels de santé qui voient dans cette constitutionnalisation de l’avortement, une menace directe sur leur liberté de conscience. Dans l’hypothèse où cette constitutionnalisation de l’avortement aurait lieu, le Professeur en chirurgie pédiatrique et néonatale Emmanuel Sapin appelle à consacrer également dans la Constitution le droit des soignants à l’objection de conscience en matière d’avortement. Il sollicite à cet égard l’intervention du Président Emmanuel Macron dans une lettre cosignée par de nombreux professionnels de santé, soulignant que l’inscription de la clause de conscience dans la Constitution est d’autant plus importante que « cette clause a été remise plusieurs fois en question, et encore récemment lors de l’examen de la loi n° 2022-295 du 2 mars 2022 visant à renforcer le droit à l’avortement. »

La formule « liberté garantie » finalement retenue pour le projet de loi se profile en réalité comme un compromis entre le « droit à l’avortement » qui figurait dans le premier texte voté par l’assemblée, et la « liberté d’avorter » que reprenait le texte voté par un Sénat plus conservateur. Néanmoins, un regard avisé, comme en témoigne celui du sénateur LR Philippe Bas (LR), voit dans l’adjectif « (liberté) garantie » un net glissement vers le « droit opposable », et ce à l’égard de toute personne qui ferait obstacle à la réalisation d’un avortement, y compris le soignant par son refus d’y participer.

Pour l’année 2022, on recense 234 000 avortements en France, un nombre record et qui correspond à 1 avortement pour 3 naissances, ou encore 16 avortements pour 1000 femmes en âge de procréer. Des associations à l’écoute de la détresse des femmes enceintes en difficulté voient dans la constitutionnalisation de l’avortement une mesure idéologique qui « soumettrait encore plus de femmes à la fatalité de l’avortement ». « Chaque jour depuis des dizaines d’années, rapporte le service d’écoute SOS bébé, nous recevons à Alliance VITA des messages de détresse qui nous peignent une toute autre réalité. » En effet, 91% des Français estiment que l’avortement « laisse des traces psychologiques difficiles à vivre pour les femmes » et les trois quarts aimeraient que « la société fasse davantage pour aider les femmes à éviter l’IVG », selon le baromètre IFOP réalisé par Alliance VITA en 2020.

Et en Belgique ?

Malgré la volonté de certains partis d’élargir dans l’urgence l’accès à l’avortement, le vote d’une nouvelle proposition de loi pour étendre son délai légal est peu probable avant la fin de la législature (9 juin). Demeure néanmoins le risque qu’une majorité parlementaire se constitue à cet effet dans la foulée des nouvelles élections, en l’absence d’accord gouvernemental.

C’est en vue de cette échéance politique que s’inscrit la campagne de deux centres d’avortement en Flandre, LUNA et Dilemma, pour supprimer le délai de réflexion précédant un avortement et élargir le délai d’avortement au-delà de 12 semaines. Le nombre d’avortements est pourtant en hausse depuis 2020. Selon la directrice de LUNA Carine Vrancken, il faut s’attendre à une augmentation d’environ 10% pour les années 2022-2023. Carine Vrancken pointe certains facteurs sociétaux à l’origine de cette augmentation des avortements : « Nous vivons une époque incertaine, avec des conflits internationaux et une vie de plus en plus chère. Ces aspects ont un impact sur la question de savoir si l'on veut encore mettre des enfants au monde".

Lors d’un débat (19 min) sur la chaîne télévisée LN24 le 25 janvier, le Dr Chantal Kortmann, membre de la Commission d’évaluation de l’avortement en Belgique, pointait l’incohérence et le caractère arbitraire du consensus du comité scientifique belge autour de l’allongement du délai d’avortement à 18 semaines : « Pour le moment, parce qu’on n’a pas encore les moyens de sauver un enfant à 18 semaines, on va dire : c’est ok de le tuer. » Et le Dr Kortmann de répéter : « La question fondamentale est : quand est-ce que commence la vie humaine ? »