« Il en va de mon intégrité professionnelle en tant que médecin »

Auteur / Source : Publié le : Thématique : Droits et libertés / Clauses de conscience Actualités Temps de lecture : 2 min.

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Au Canada, plus de 1000 médecins alertent sur les dangers que contient le projet de loi C-7 élargissant l'euthanasie, actuellement débattu au Parlement. « La suppression imprudente des mesures de protection précédemment jugées essentielles mettra les patients et patientes vulnérables directement en danger, et pourrait même leur coûter la vie », écrivent-ils dans une déclaration commune.

 

A peine 4 ans après la dépénalisation partielle de l'euthanasie dans le pays, il est en effet question d'élargir substantiellement son application en supprimant la condition de « mort raisonnablement prévisible » actuellement prévue dans la loi. Par ailleurs, le texte prévoit la suppression du délai de 10 jours entre la demande d'euthanasie et l'injection létale, dans le cas où la mort naturelle est raisonnablement prévisible. (Voy. ce Bulletin de l'IEB)

Les 1051 médecins que la déclaration rassemble à ce jour, s'inquiètent de la profonde distorsion que subit la profession médicale depuis que le médecin est aussi celui qui provoque la mort du souffrant : « Notre profession a été forcée de faciliter le suicide au lieu de le prévenir, et ce, pour un nombre toujours croissant de personnes. » Ils redoutent – a fortiori si l'accès à l'euthanasie est élargi conformément au projet débattu – d'être toujours plus forcés à « arranger et faciliter l'administration de l'euthanasie et du suicide assisté », comme l'exigent déjà certains organismes de réglementation au Canada. (Voy. aussi : "Canada : les médecins qui refusent de pratiquer des euthanasies mis sous pression")

Cette préoccupation par rapport à la liberté de conscience du médecin habite le Dr Leonie Herx, coauteur de la déclaration, et qui pratique la médecine palliative depuis 12 ans. « On associe très facilement la conscience à la religion, alors qu'en réalité il s'agit de mon intégrité professionnelle en tant que médecin qui a de l'expérience », explique-t-elle dans une vidéo. Avec l'euthanasie à portée de main de ses patients, le Dr Herx voit son expérience « disqualifiée ». « Cela m'empêche de pouvoir avoir une relation de confiance avec beaucoup de mes patients », confie-t-elle. Presque tous les patients qu'elle accompagne en soins palliatifs ont un décès « raisonnablement prévisible ». Si, comme le prévoit le projet de loi, le délai d'attente de 10 jours entre la demande et la pratique de l'euthanasie est supprimé, ses patients pourraient demander et obtenir l'euthanasie dans la même journée : « en réalité, leur pire journée devient leur dernière journée, sans aucune opportunité de guérir ».

La déclaration des médecins canadiens n'est pas sans faire penser à une récente enquête de la British Medical Association selon laquelle au Royaume-Uni, les médecins qui soignent les malades en phase terminale (i.a. oncologie, gériatrie, soins palliatifs) sont majoritairement opposés à la modification de la loi britannique pour permettre le suicide assisté.